Télécommunications

Le but d’un système de télécommunication est de transmettre une information à une certaine distance. Pour cela différents procédés existent selon le signal à transmettre mais fondamentalement le codage d’un signal sur un support en vue de sa transmission repose sur des principes communs. Dans ce chapitre, nous verrons en particulier les notions liées à la modulation et la démodulation d’une onde porteuse électromagnétique, en amplitude et en fréquence, dont on trouve de nombreuses applications dans la vie courante mais aussi à l’agrégation.

Les télécommunications à l’agrégation: les notions de modulation ou de démodulation peuvent apparaître dans les épreuves suivantes:

  • Leçons : traitement d’un signal, étude spectrale.

  • MP43: Mise en forme, transport et détection de l’information. (indispensable)

  • MP45: Signal et bruit. (éventuellement pour la détection synchrone)

  • MP52: Détection synchrone.

  • MP53: Systèmes bouclés. (éventuellement pour la boucle à verrouillage de phase)

Introduction

Enjeux et objectifs

Le plus ancien moyen de télécommunication est l’expression orale: toute société humaine possède un langage propre, sorte de codage de ses connaissances ou de ses sentiments. Une deuxième façon de présenter l’information à transmettre est l’écriture, prolongement de la forme orale si l’écriture est de type phonétique (alphabet) ou prolongation de notions conceptuelles déconnectées de l’oral si l’écriture est à base d’idéogrammes (cas du monde sinisé). Une troisième manière de représenter de l’information est l’image fixe (peinture, photographie) ou animée (cinéma, vidéo). Le stade actuel de codage de l’information est la représentation numérique, soit du son, soit du texte, soit de l’image. L’information doit donc être transformée d’abord en signal à transmettre ce qui sous-entend une mise en forme et un codage. Les techniques de codage se sont développées dans le but d’assurer un plus grand débit mais aussi une plus grande fiabilité dans la transmission.

Transmettre l’information d’un endroit à un autre n’est rien d’autre que de la transporter par des moyens divers, qui ont évolués au cours des siècles. Le transport peut être sonore (voix, tam-tam africains), visuel (langue des signes, signaux de fumée des indiens d’Amérique, télégraphe de Chappe) mais aussi réalisé tout simplement par un messager, un porteur (un facteur, un pigeon voyageur, un avion). Dans l’époque récente, on a su introduire de nouveaux types de porteur de l’information permettant un débit plus important, une accessibilité plus souple, une sécurité plus grande : on utilise maintenant les ondes électromagnétiques (dans différents domaines de fréquence ou de longueur d’onde), et l’on emploie le terme de porteuse, bien que certains n’y voyaient aucune application au départ:

Electromagnetic waves are of no use whatsoever[...] this is just an experiment that proves Maestro Maxwell was right—we just have these mysterious electromagnetic waves that we cannot see with the naked eye. But they are there.

Heinrich Hertz, découvreur des ondes électromagnétique 1886-1890

Si l’on parle de transporter ou transmettre l’information il faut spécifier, bien sûr selon les moyens mis en œuvre, le chemin que l’on va utiliser pour cela (par terre, par mer, par air... ). On parle aussi de canal de transmission en particulier quand on utilise une porteuse électromagnétique. Est-ce que ce canal est ouvert à l’interception du message (onde dans l’air) ou guidé (câble coaxial, fibre optique) ? Est-il susceptible d’altérer le contenu du message (orages, absorption, dispersion) ? L’information prend bien sûr une certaine place sur le chemin qui lui est dédié (taille des signaux de fumée, encombrement des lettres et colis, mais aussi encombrement spectral dans le cas de la porteuse électromagnétique). On parle alors de largeur de canal ou de largeur de bande.

Il faut aussi réfléchir à la façon de confier l’information (au préalable mise en forme et codée) au moyen de transport de l’information (donner un courrier au facteur, ficeler un message à la patte d’un pigeon voyageur). Est-ce que ce processus est fiable, robuste, adapté ? S’il s’agit là encore d’utiliser une onde électromagnétique, il faut aussi "accrocher l’information" à cette porteuse, et l’on parle alors de modulation de la porteuse.

A l’arrivée, il faudra ouvrir la lettre ou le paquet, décoder l’information. On parlera de démodulation à la réception pour une onde électromagnétique. Est-ce que la méthode de décodage est aisée à mettre en œuvre ? Introduit-elle des erreurs de compréhension ?

Enfin, pour terminer ce panorama général, il est important de parler de critère de qualité pour la transmission mise en œuvre. La lettre a-t-elle été mouillée ou salie? Manque-t-il une partie? Le son ou l’image ont-ils été déformés? On utilise les notions de spectre, de bruit, de rapport signal à bruit ou de taux d’erreur par bit (bit error rate) pour quantifier la qualité de la transmission.

Principes généraux de la modulation

A l’agrégation de physique, et plus légèrement sur une paillasse de TP, la forme de télécommunication la plus simple à étudier est celui de la radio analogique. Examinons un peu plus le cas de la transmission d’un signal audio par une porteuse électromagnétique pour comprendre la nécessité de moduler. A quelle fréquence faut-il choisir celle dernière? Si l’on imagine transmettre une onde électromagnétique de même fréquence que le signal audio, on est confronté à deux problèmes:

  1. encombrement: impossible à la réception de distinguer deux signaux de la même plage de fréquence (comme deux personnes qui parlent en même temps dans une pièce)

  2. dimensions des antennes: pour être émise et réceptionnée une onde électromagnétique nécessite une antenne dont la taille doit être de l’ordre de grandeur de la longueur d’onde émise; pour les fréquences audibles (environ \(20\,\hertz\) à \(20\,000\,\hertz\)), l’antenne doit être de taille gigantesque mais aussi d’une grande variabilité: de \(1500\,\kilo\meter\) à \(1.5\,\kilo\meter\).

Il faut donc changer de gamme de fréquence: au lieu de travailler à la fréquence (basse) du signal, on travaille au voisinage de la fréquence (élevée) de la porteuse. Une porteuse de \(1\,\mega\hertz\) modulée par un signal audio n’encombre que la gamme \(1.00002 - 1.02000\,\mega\hertz\). On peut ainsi créer de nombreux canaux dans une gamme de fréquence de quelques \(\mega\hertz\). De plus la longueur d’onde est plus raisonnable pour la taille des antennes (pour \(f=100\,\mega\hertz\), \(\lambda=3\,\meter\)). Enfin la variation relative de fréquence est faible: une seule antenne peut être adaptée à tous les canaux. De manière générale, la fréquence de la porteuse est donc beaucoup plus élevée que celle du signal à transporter, et ce d’autant plus que le spectre de ce signal est riche en fréquences.

Quelle quantité peut-on moduler sur une porteuse électromagnétique? Une onde porteuse s’écrit typiquement:

\[s_p(t) = A \cos(\omega t + \varphi)\]

On peut donc jouer sur plusieurs paramètres:

  • \(A\): modulation d’amplitude (radio AM, modulation d’amplitude d’un faisceau laser dans une fibre optique, téléphonie 4G et 5G, télévision numérique terrestre)

  • \(\omega\): modulation de fréquence (radio FM, télévision par satellite, téléphonie 3G)

  • \(\varphi\): modulation de phase (Wifi, RFID, Bluetooth, transmission radio numérique)

Ces paramètres peuvent être modulés de façon analogique ou numérique (voir Figures Tableau 21 et Tableau 22).

Tableau 21 Modulations d’amplitude (AM, \(\mu=0.7\)), de fréquence (FM, \(\beta=3\)) et de phase (PM) d’une porteuse avec un signal d’entrée sinusoïdal. Gauche : évolutions temporelles. Droite : spectres de puissance en fréquence.
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Tableau 22 Modulations d’amplitude (AM, \(\mu=0.7\)), de fréquence (FM, \(\beta=3\)) et de phase (PM) d’une porteuse avec un signal d’entrée sinusoïdal. Gauche : évolutions temporelles. Droite : spectres de puissance en fréquence.
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D’ores et déjà, commençons par donner quelques ordres de grandeurs concernant les télécommunications pour concrétiser la suite de ce chapitre.

  • Quelques chiffres sur la radio:

    Type de modulation

    Modulation d’amplitude

    Modulation en fréquence

    Fréquence de la porteuse

    \(150\,\kilo\hertz - 26.1\,\mega\hertz\)

    \(87.5\,\mega\hertz - 108\,\mega\hertz\)

    Fréquence maximale du signal utile

    \(4.5\,\kilo\hertz\)

    \(15\,\kilo\hertz\)

    Intervalle entre deux canaux

    \(10\,\kilo\hertz\)

    \(200\,\kilo\hertz\)

    Avantages

    longue portée, signal facile à fabriquer et recevoir

    meilleure bande passante et donc qualité sonore, beaucoup moins sensible aux parasites

  • Téléphonie mobile: deux bandes historiques à \(800-900\) et \(1700-1900\,\mega\hertz\), puis 3500  avec la 5G

  • Télévision numérique terrestre: \(474-786\,\mega\hertz\) répartis en 60 canaux de \(8\,\mega\hertz\)

  • Télévision satellite: environ \(10\,\giga\hertz\)

  • Internet par fibre optique: environ \(2\times 10^{14}\,\hertz\)

Modulation et démodulation d’amplitude

La transmission radiophonique par modulation d’amplitude est la première à avoir été mise en œuvre pour diffuser à partir des années 1920 typiquement les informations nationales, météorologiques et quelques émissions musicales, à des fréquences de l’ordre de \(100\,\). L’enjeu est donc d’accrocher une information essentiellement vocale de l’ordre de la centaine de hertz, sur une onde électromagnétique de fréquence bien plus rapide.

Le multiplieur analogique

Ce composant est tout à fait commun dans les salles de TP et pourra être utilisé pour réaliser la modulation d’amplitude (figure Tableau 23). Les multiplieurs de signaux analogiques sont couramment employés en électronique. Ils réalisent correctement la multiplication de deux signaux de faible puissance et de fréquences inférieures au \(\mega\hertz\). De tels circuits comportent:

  • deux bornes d’alimentation symétriques \(\pm 15\,\volt\)

  • deux entrées différentielles \(X_1,X_2\) et \(Y_1,Y_2\) (les tensions appliquées ne doivent pas dépasser \(10\,\volt\))

  • un circuit multiplieur réalisant l’opération \(k(X_1-X_2)(Y_1-Y_2)\)\(k\) est une constante caractéristique du composant (souvent \(k\approx 0.1\,\volt^{-1}\))

  • un sommateur ajoutant la tension \(z(t)\) au résultat précédent (si on ne se sert pas de cette fonction, il est impératif de mettre cette entrée à la masse)

  • une sortie \(s(t)\) réalisant l’opération:

    \[s(t) = k(X_1-X_2)(Y_1-Y_2) + z(t)\]
  • une masse M.

Dans la suite, on considérera pour simplifier que \(X_2=Y_2=z(t)=0\,\volt\).

Tableau 23 Gauche : multiplieur analogique en TP. Droite : multiplieur analogique AD633JN AD633.
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Modulation

La modulation d’amplitude conventionnelle est appelée modulation double bande à porteuse conservée (DBPC). Soit un signal de porteuse \(v_p(t) = A_p \cos(\omega_p t)\) et un signal modulant \(v_u(t)\). Le signal \(v_u(t)\) est injecté dans le multiplieur additionné [1] d’une tension continue \(V_u\), avec le signal de porteuse \(v_p(t)\). En sortie du multiplieur, on a alors :

\[v_s(t) = k A_p \left[ V_u + v_u(t) \right]\cos(\omega_p t) = k A_p V_u \left[ 1 + m(t) \right]\cos(\omega_p t)\]

avec \(m(t) = v_u(t)/V_u\). On introduit le signal modulant normalisé \(m_n(t) = m(t) / \mathrm{max}\vert m(t)\vert\):

\[v_s(t) = k A_p V_u \left[ 1 + \mu m_n(t) \right]\cos(\omega_p t), \quad \mu = \frac{\mathrm{max}\vert v_u(t)\vert}{V_u}\]

\(\mu\) est l’indice de modulation. C’est donc le ratio entre l’amplitude maximum du signal utile et la tension continue qui lui est additionnée. Dans le cas particulier d’un signal \(v_u(t)\) sinusoïdal de pulsation \(\omega_u\), on pose \(v_u(t) = v_u \cos(\omega_u t)\), alors le signal de sortie du multiplieur est:

\[v_s(t) = k A_p V_u \left[ 1 + \mu \cos(\omega_u t) ) \right]\cos(\omega_p t), \quad \mu = \frac{v_u}{V_u}\]

Dans la suite, afin de ne conserver que les termes qui jouent un rôle essentiel, on pose \(k=1\,\volt^{-1},V_u=1\,\volt,A_p=1\,\volt\) d’où

\[v_s(t) = \left[ 1 + \mu \cos(\omega_u t) ) \right]\cos(\omega_p t)\]

C’est l’équation d’une sinusoïde dont l’amplitude varie au rythme du signal utile (d’où le nom de modulation d’amplitude).

Représentation dans le domaine temporel :

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Fig. 50 Représentation de la modulation d’amplitude d’une porteuse sinusoïdale par un signal sinusoïdal additionné d’un offset.

la sortie \(v_s(t)\) résultant d’une modulation d’amplitude DBPC est représentée figure Fig. 50. Sur le graphe du signal modulé on lit:

\[v_{s,\text{crête max}} = 1+\mu, v_{s,\text{crête min}} = 1-\mu\]

Définition 1. L’indice de modulation se mesure expérimentalement par:

\[\boxed{\mu = \frac{v_{s,\text{crête max}} - v_{s,\text{crête min}}}{v_{s,\text{crête max}}+v_{s,\text{crête min}}}}\]

Il se présente alors deux cas particuliers (figure Fig. 51). Dans le cas \(\mu=1\) (modulation à 100%), l’enveloppe du signal modulé s’annule avec une période \(2\omega_u\). Dans le cas \(\mu>1\), on est en sur-modulation, ce qui pose des problèmes pour retrouver le signal modulant avec une détection de crête (voir section Démodulation). Pour corriger cela on peut augmenter la tension continue \(V_u\) (en général on ne modifie pas le signal utile \(v_u(t)\)).

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Fig. 51 Cas \(\mu=1\) (haut) et \(\mu>1\) (bas).

Représentation dans le domaine fréquentiel :

la multiplication étant une opération non-linéaire, de nouvelles fréquences apparaissent dans le spectre du signal modulé. Dans le cas d’un signal modulant sinusoïdal, on a:

\[v_s(t) = \left[ 1 + \mu \cos(\omega_u t) ) \right]\cos(\omega_p t) = \cos(\omega_p t) + \frac{\mu}{2}\cos((\omega_p-\omega_u) t) + \frac{\mu}{2}\cos((\omega_p+\omega_u) t)\]

Le spectre est donc composé de trois raies au voisinage de \(\omega_p\).

Dans le cas général d’un signal modulant quelconque, posons \(M_n(f)\) le spectre associé au signal modulant normalisé \(m_n(t)\). Le spectre du signal de sortie est alors représenté figure Fig. 52. On remarque donc qu’un canal doit être deux fois plus large que le spectre du signal à transmettre.

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Fig. 52 Représentation fréquentielle de la modulation d’amplitude DBPC (haut) et DBPS (bas).

Autres types de modulation :

dans une émission à modulation DBPC à \(\mu<1\), la porteuse concentre la majeure partie de l’énergie émise, et la largeur de canal occupé est deux fois plus large que le spectre du signal modulant. Or une seule bande latérale permettrait de restituer le signal modulant. Du point de vue de la puissance émise et de l’encombrement spectral du canal, on voit donc que la modulation DBPC n’est pas idéale.

La modulation double bande à porteuse supprimée (DBPS) est obtenue par simple multiplication du signal de la porteuse par le signal modulant:

\[v_s(t) = k A_p v_u(t) \cos(\omega_p t)\]

Ce cas correspond à une modulation DBPC pour \(\mu \rightarrow \infty\) (\(V_u = 0\)). Dans le spectre du signal modulé la fréquence de la porteuse disparaît mais l’encombrement spectral est le même (voir figure Fig. 52). L’avantage de la modulation DBPS permet de concentrer la puissance de l’antenne dans la transmission du spectre contenant le signal uniquement. L’inconvénient est que l’utilisateur à la réception doit se débrouiller pour reconstruire la porteuse pour démoduler correctement le signal (voir section Démodulation). Pour éviter cela, on peut simplement atténuer la puissance contenue dans la fréquence porteuse, on parle alors de modulation à porteuse atténuée.

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Fig. 53 Allure du signal émis en modulation d’amplitude à porteuse supprimée.

Pour réduire l’encombrement du canal, il est possible de supprimer un des deux côtés du spectre autour de la porteuse (elle-même supprimée), c’est ce qu’on appelle la modulation à bande latérale unique (BLU). On peut conserver soit la bande inférieure soit la bande supérieure. Cette technique est employée entre autres dans les communications marines ou de l’aviation: réduire l’encombrement spectral permet de définir plus de canaux et donc de communiquer avec plus de navires à la fois, un par canal, autour des ports et aéroports.

Démodulation

L’opération pour ne récupérer que le signal de spectre \(M_n(f)\) codé dans la porteuse est forcément non linéaire. Nous allons étudier deux méthodes réalisables en TP: la détection de crête et la détection synchrone.

Détection de crête :

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Fig. 54 Principe de la détection de crête.

le circuit de détection est constitué simplement d’une diode et d’un filtre passe-bas RC parallèle (figure Fig. 54). Quand la diode est passante, la tension \(v_s-v_{\rm dem}\) aux bornes de la diode est quasi nulle, la diode conduit et le condensateur se charge. La tension \(v_{\rm dem}\) vaut donc quasiment la tension du signal modulé. Quand la diode est bloquante, le condensateur se décharge dans la résistance parallèle. Comme la résistance présente dans la branche du condensateur est négligeable, la charge du condensateur est beaucoup plus rapide que la décharge dans la résistance dans la branche parallèle. Si la constante de temps du circuit résistance-condensateur est correctement choisie, sa tension reste à peu près constante entre deux crêtes de la porteuse.

La constante de temps du circuit doit être choisie de façon à ce que la fréquence de la porteuse soit filtrée tandis que la plus haute fréquence contenue dans le signal est conservée. Elle doit donc être choisie de façon intermédiaire entre \(T_p\) période de la porteuse et \(T_{u,min}\) la période minimale du signal. Dans l’idéal on choisit \(\tau=RC\) légèrement plus petit que \(T_p\) voire un ordre de grandeur en dessous.

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Fig. 55 Effet de la détection de crête sur une porteuse modulée par un signal sinusoïdal de période \(T_u\).

Figure Fig. 55, on voit que le signal démodulé est voisin (à un offset près) du signal utile. En pratique, l’écart de fréquence entre \(v_u\) et \(v_p\) est beaucoup plus grand que sur la figure et l’ondulation résiduelle est négligeable. En revanche, on comprend en étudiant la figure Fig. 51 que l’opération de détection de crête ne permet pas de retrouver le signal utile en cas de surmodulation. Cependant, la détection synchrone le permet.

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Fig. 56 Principe de la démodulation par détection synchrone.

Détection synchrone :

dans le cas d’un signal modulé en amplitude avec porteuse supprimée on ne peut pas utiliser la détection d’enveloppe, ni dans les cas de surmodulation. La détection synchrone consiste à multiplier le signal modulé reçu par un signal de même fréquence et de même phase que la porteuse, le tout étant suivi d’un passe-bas (figure Fig. 56). Pour régénérer aussi exactement la porteuse, on peut utiliser une boucle à verrouillage de phase, mais la fréquence porteuse doit être présente dans le signal modulé, même atténuée (voir section La boucle à verrouillage de phase). Si la fréquence porteuse est complètement absente du spectre reçu, il faut alors se débrouiller pour bien accorder un oscillateur local pour générer un signal de même fréquence que la porteuse, mais la réception est mauvaise (on entend des battements dans le cas de la radio) (voir encadré section La boucle à verrouillage de phase).

Supposons maintenant que le signal de la porteuse est correctement reconstitué et notons le \(v_p'(t) = \cos(\omega_p t + \varphi)\). Pour réaliser la détection synchrone, cette porteuse synthétique est multipliée par le signal modulé capté par l’antenne (et éventuellement amplifié avant). Le signal produit en sortie du multiplieur vaut:

\[p(t) = \left[ 1 + \mu m_n(t) \right]\cos(\omega_p t) \times \cos(\omega_p t + \varphi) = \left[1 + \mu m_n(t) \right] \left[ \cos\varphi + \cos(2\omega_p t+\varphi)\right]\]

Avec le filtre passe-bas on élimine le signal de pulsation \(2\omega_p\) et on ne garde que le signal démodulé:

\[v_{\rm dem}(t) = \left[ 1 + \mu m_n(t) \right] \cos\varphi\]

et \(v_{\rm dem}(t)\) est bien l’image du signal utile \(v_u(t)\).

En cas de non synchronisme de l’oscillateur local avec la porteuse du signal, on peut entendre des battements. De plus, il faut chercher à avoir \(\varphi = 0\) ou \(\pi\). Si le déphasage varie avec le temps (\(\varphi\rightarrow \varphi(t)\)), on parle de phénomène de "fading" [2].

Modulation et démodulation de fréquence

L’émission radiophonique par modulation de fréquence est apparue dans les années 1940, et utilise toujours aujourd’hui la gamme de fréquence située autour de \(100\) . Cette technique permet une transmission du signal moins sensible aux parasites environnementaux et des largeurs de canaux plus importantes (ce qui permet de diffuser des émission musicale avec une bonne qualité audio), mais est de plus courte portée.

La boucle à verrouillage de phase

Tableau 24 Gauche : montage de la boucle à verrouillage de phase. Droite : circuit intégré CD4046BE Phase Locked Loop DIP-16 Texas 213ic085 (1.89€ seulement...).
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La boucle à verrouillage de phase (phase locked loop = PLL) est un montage permettant d’asservir la phase instantanée d’un signal de sortie sur la phase instantanée d’un signal d’entrée. Par conséquent c’est aussi un système capable d’asservir la fréquence de sortie du système sur la fréquence d’entrée. Une fois synchronisé - on dit aussi verrouillé (locked) - l’écart en phase entre les deux signaux reste constant, d’où le nom de boucle à verrouillage de phase. La première PLL date de 1932. Elle a été réalisée par l’ingénieur français De Bellescize qui est donc considéré comme l’inventeur des "télécommunications cohérentes".

En 1965 est apparu le premier circuit intégré permettant de réaliser une boucle purement analogique; dans les années 1970 on vit les premiers éléments dits numériques (comparateurs de phase) puis la PLL tout numérique ne contenant aucun composant passif du type condensateur ou résistance (voir figure Tableau 24). Enfin, à l’âge des micro-contrôleurs et des processeurs de signaux il est possible de développer des PLL dites "software PLL". On trouve maintenant des boucles à verrouillage de phase dans des domaines innombrables : communications, asservissement de vitesse, optique...

Une boucle à verrouillage de phase est constituée :

  • et d’un comparateur de phase qui renvoie un signal proportionnel au déphasage entre une entrée arbitraire et le VCO.

  • d’un filtre passe-bas de fréquence de coupure très inférieure aux fréquences des signaux mis en jeu

  • d’un oscillateur contrôlé en tension (VCO)

Dans une boucle de type analogique comme rencontrée en TP, le comparateur de phase est un multiplieur. Le schéma bloc de la boucle est donné à la figure Fig. 57. Les fréquences sont ici des fonctions du temps (par exemple en modulation de fréquence on codera l’information d’un signal sur la fréquence de la porteuse).

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Fig. 57 Schéma bloc d’une boucle à verrouillage de phase analogique.

On notera \(u_1(t)\) le signal d’entrée de la boucle, de pulsation \(\omega_1\) et de phase \(\varphi_1(t)\):

\[u_1(t) = U_1 \cos(\omega_1 t + \varphi_1(t))\]

Le signal de sortie du VCO est noté de la même manière:

\[u_2(t) = U_2 \cos(\omega_2 t + \varphi_2(t))\]

Comparateur de phase :

le signal de sortie du comparateur de phase est noté \(u_s(t)\). Dans le cas d’un multiplieur, on obtient:

\[u_s(t) = \frac{k}{2}U_1 U_2 \left\lbrace \cos\left[(\omega_2-\omega_1)t + \varphi_2(t)-\varphi_1(t)\right] + \cos\left[(\omega_2+\omega_1)t + \varphi_2(t)+\varphi_1(t)\right] \right\rbrace\]

A la sortie du filtre, on récupère seulement la composante basse-fréquence. Dans le cas d’un filtre parfait, on a:

(23)\[ u_f(t) = K_f \cos\left[(\omega_2-\omega_1)t + \varphi_2(t)-\varphi_1(t)\right]\]

Oscillateur contrôlé en tension :

un VCO délivre une tension de fréquence proportionnelle à une tension d’entrée (si le VCO est linéaire, ce qu’on supposera ici). La pulsation \(\omega_2(t)\) du signal de sortie est donc définie par:

(24)\[\omega_2(t) = \omega_0 + K_0 u_f(t)\]

\(K_0\) est le coefficient de conversion (ou gain) de l’oscillateur et \(\omega_0\) une fréquence centrale à choisir par l’utilisateur.

Fonctionnement de la boucle :

l’asservissement de la boucle est non-linéaire, notamment à cause de la présence du VCO et du multiplieur. L’explication théorique complète est donc délicate, on se contentera de quelques explications en admettant la présence du synchronisme.

Si la boucle est accrochée alors \(\omega_2 = \omega_1\) et les pulsations ne varient plus dans le temps. Alors les pulsations vérifient d’après Eq.24:

\[\frac{\omega_2 - \omega_0}{K_0} = \frac{\omega_1 - \omega_0}{K_0} = u_f(t)\]

Or dans ce cas on a aussi \(u_f(t) = K_f \cos(\varphi_2(t) - \varphi_1(t))\) d’après Eq.23 donc le déphasage entre les deux signaux est donné par:

(25)\[\cos(\varphi_2(t) - \varphi_1(t)) = \frac{\omega_1 - \omega_0}{K_0 K_f}\]

Si la boucle est verrouillée, alors l’écart en phase entre le signal d’entrée et le signal de l’oscillateur est constant dans le temps: en cas de synchronisme \(\omega_2=\omega_1\) l’oscillateur est asservi en phase.

Étudions la stabilité de la boucle verrouillée. Dans le cas particulier où \(\omega_1 = \omega_0 = \omega_2\), alors \(\cos(\varphi_2 - \varphi_1) = 0\) et \(\varphi_2 - \varphi_1 = \pi/2\). Pour une faible variation \(\delta\omega>0\) de la fréquence d’entrée \(\omega_1\) autour de ce point de fonctionnement, un déphasage \(\delta \varphi_e\) entre le signal d’entrée et le signal du VCO à l’entrée de la boucle. D’après Eq.25, on a:

\[\begin{aligned} \omega_1 = \omega_0 + \delta\omega \Rightarrow & \cos\left( \frac{\pi}{2} + \delta \varphi_e\right) \approx \frac{\delta\omega}{K_0 K_f}\Rightarrow \delta\varphi_e \approx - \frac{\delta\omega}{K_0 K_f}\end{aligned}\]

car \(\cos\left( \frac{\pi}{2} + \delta \varphi_e\right)\approx - \delta\varphi_e\). La sortie du VCO crée donc un déphasage \(\delta \varphi_e\) négatif entre les signaux et le comparateur de phase réagit donc avec une tension positive (\(u_f \propto -\sin\delta\varphi_e\)) qui va augmenter \(\omega_2\) pour rejoindre \(\omega_1\): la boucle est donc stable et reste verrouillée sur la nouvelle pulsation \(\omega_1\).

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Fig. 58 Plages de capture et de verrouillage de la boucle à verrouillage de phase. Les flèches représentent les deux chemins par valeur de pulsation ascendante ou descendante qui illustrent la capture puis le verrouillage de la boucle.

On considère la boucle dans un état "non verrouillé". La plage de capture est l’intervalle de fréquences d’entrée pour lesquelles le VCO est capable de se synchroniser sur le signal d’entrée. Au départ le VCO fonctionne à la fréquence \(\omega_0\), et si la différence de fréquence \(\omega_1-\omega_0\) sort de la bande passante du filtre passe-bas, alors \(u_f \approx 0\). Pour verrouiller la boucle, il faut donc régler \(\omega_0\) pour que l’écart \(\omega_0 - \omega_1\) soit contenu dans la bande passante du filtre et obtenir une tension de commande du VCO \(u_f(t)\) non nulle, et une rétroaction qui permet le synchronisme du VCO sur le signal d’entrée. Donc \(\Delta\omega_C = 2\times 2\pi B_F\)\(B_F\) est la bande passante du filtre (en \(\hertz\)).

On considère maintenant que la boucle est dans l’état verrouillé. La plage de verrouillage est l’intervalle \(\Delta\omega_V\) de fréquences du signal d’entrée (donc \(\omega_1\)) à l’intérieur de laquelle on peut faire varier lentement la fréquence du signal d’entrée la boucle restant verrouillée (i.e. \(\omega_2 = \omega_1\)). L’excursion possible en \(\omega_2\) est donnée par le VCO: \(\omega_2 \in \left[ \omega_0 - K_0 K_f, \omega_0 + K_0 K_f \right]\) (car \(u_{f,\text{max}} = K_f\) et \(u_{f,\text{min}} = -K_f\)). Donc \(\Delta\omega_V = 2 K_0 K_f\).

Logiquement, on doit avoir \(\Delta\omega_C \leqslant \Delta\omega_V\). Les plages de capture et de verrouillage sont représentées figure Fig. 58.

Important à savoir: la boucle à verrouillage de phase peut être utilisée dans un système de démodulation d’amplitude pour régénérer une porteuse de même fréquence et phase que le signal modulé, et ainsi permettre sa démodulation par détection synchrone.

Note

Régénération de la porteuse en AM

Si le signal modulé en modulation AM est en porteuse conservée ou atténuée, alors à l’aide d’une boucle à verrouillage de phase on peut régénérer un signal de porteuse exactement de même fréquence que celle qui a été utilisée lors de la modulation. Mais cela nécessite que la fréquence de la porteuse soit assez isolée dans le spectre du signal modulé ou d’avoir un filtre suffisamment sélectif pour ne pas capter des fréquences venant du signal modulant.

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Si le signal modulé est à porteuse supprimée, alors le signal capté par l’antenne est multiplié par lui-même, puis un filtre passe-bande en extrait le signal de fréquence \(2f_p\). Un diviseur de fréquence (souvent numérique), permet ensuite de récupérer un signal de fréquence \(f_p\) exactement.

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Modulation de fréquence

Pour moduler en fréquence une porteuse (amplitude \(A_p=1\,\volt\) et pulsation \(\omega_p\)), il suffit d’utiliser un VCO. Pour un signal modulant sinusoïdal \(v_u(t) = A_u \cos \omega_u t\), en sortie d’un VCO réglé sur la fréquence \(f_0=f_p\) on obtient un signal de fréquence:

\[f_s(t) = f_p + K_0 v_u \cos \omega_u t\]

On pose \(\Delta f = K_0 v_u\) la déviation de fréquence (ou excursion en fréquence), on en déduit \(f_s = f_p + \Delta f \cos \omega_u t\). Cette grandeur est facilement mesurable sur un oscilloscope en utilisant un mode de visualisation persistant et en identifiant la sinusoïde de fréquence la plus basse et celle de fréquence la plus haute à l’écran. Dans un système réel \(\Delta f \ll f_p\) (avec trigger sur le signal modulé).

Le signal de sortie du VCO peut s’écrire sous la forme:

\[v_s(t) = A_s \cos \varphi_s(t)\]

avec \(\omega_s = d \varphi_s / dt\) la pulsation instantanée du signal. D’où:

\[\varphi_s(t) = \int \omega_s dt = \int \left(\omega_p + \Delta \omega \cos \omega_u t \right) = \omega_p t + \frac{\Delta \omega}{\omega_u} \sin \omega_u t\]

Définition 2. Dans le cas d’une modulation de fréquence, l’indice de modulation est défini par:

\[\boxed{\beta = \frac{\Delta f}{f_u}}\]

pour un signal modulant sinusoïdal. Pour un signal modulant quelconque de largeur spectrale \(b\), il devient:

\[\boxed{\beta = \frac{\Delta f}{b}}\]

\(\beta\) comme \(\Delta f\) est donc proportionnel à l’amplitude du signal utile.

Spectre d’une modulation de fréquence :

on pourrait croire que le domaine spectral occupé est compris entre \(f_p - \Delta f\) et \(f_p + \Delta f\), mais il ne faut pas confondre la fréquence instantanée du signal modulé qui appartient effectivement à cet intervalle, avec les fréquences des signaux sinusoïdaux permanents nécessaires pour reconstituer le signal modulé. En effet, rappelons-nous qu’en modulation d’amplitude la fréquence du signal modulé ne varie pas et pourtant il y a (au moins) trois fréquences dans le spectre !

On part de \(v_s(t) = A_s \cos \left(\omega_p t + \beta \sin \omega_u t \right) = \Re(\underline{v}_s(t))\) avec:

\[\underline{v}_s(t) = A_s e^{j\omega_p t} e^{j \beta \sin \omega_u t}\]

Or, on a la formule suivante:

\[e^{jx \sin \theta} = \sum_{n=-\infty}^{+\infty} J_n(x) e^{jn\theta}\]

avec \(J_n(x)\) la fonction de Bessel d’ordre \(n\). On retiendra que les coefficients de Bessel \(J_n(1)\) sont les coefficients du développement en série de Fourier des fonctions \(\cos(\sin\theta)\) et \(\sin(\sin\theta)\).

On peut donc écrire:

\[\underline{v}_s(t) = A_s e^{j\omega_p t} \sum_{n=-\infty}^{+\infty} J_n(\beta) e^{jn\omega_u t} = A_s \sum_{n=-\infty}^{+\infty} J_n(\beta) e^{j(\omega_p + n\omega_u) t}\]
\[\begin{split}\begin{aligned} v_s(t) & = \Re(\underline{v}_s(t)) = A_s \sum_{n=-\infty}^{+\infty} J_n(\beta) \cos\left(\omega_p + n\omega_u\right) t \notag \\ & \propto J_0(\beta) \cos \omega_p t + J_{1}(\beta) \cos(\omega_p+\omega_u)t + J_{-1}(\beta) \cos(\omega_p-\omega_u)t + \notag \\ & \qquad J_{2}(\beta) \cos(\omega_p+2\omega_u)t +J_{-2}(\beta) \cos(\omega_p-2\omega_u)t +...\end{aligned}\end{split}\]

Seules deux propriétés des fonctions de Bessel serviront ici:

  • \(\left\vert J_{-n}(x) \right\vert = \left\vert J_{n}(x) \right\vert\) donc les raies spectrales sont symétriques autour de \(f_p\)

  • \(J_n \ll 1\) si \(n\) est assez grand d’où la règle de Carson donnée ci-après.

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Fig. 59 Spectre d’un signal modulé en fréquence.

Le spectre d’un signal modulé en fréquence est représenté figure Fig. 59. Les fonctions \(J_n(\beta)\) s’annulent régulièrement quand \(\beta\) varie et en particulier \(J_0(\beta)=0\) pour \(\beta = 2.4, 5.52,...\): ces valeurs de \(\beta\) annulent la contribution de la porteuse dans le spectre du signal émis. On voit aussi que le spectre contient une infinité de raies, équidistantes, symétriques autour de la fréquence de la porteuse. L’occupation spectrale d’un signal modulé en fréquence dans un canal est donc infinie et plus importante que dans le cas d’une modulation d’amplitude. Comment donc garantir que chaque utilisateur n’empiète pas (trop) sur le canal du voisin ?

Propriété 3. On définit la règle de Carson (admise ici), qui énonce que \(98\%\) de l’énergie du signal modulé en fréquence par une sinusoïde se situe dans l’intervalle:

\[f_p - (f_u + \Delta f ) \leqslant f_p \leqslant f_p + (f_u + \Delta f )\]

Cette règle devient empirique pour un signal quelconque. La bande de Carson est donc de largeur \(2 (f_u + \Delta f )\) pour un signal sinusoïdal ou \(2(\Delta f + b)\) pour un signal quelconque de largeur spectrale \(b\).

La bande de Carson peut être retrouvée expérimentalement à l’oscilloscope en sommant la hauteur (au carré) des pics observés dans la transformée de Fourier du signal modulé. En radio FM, les canaux sont espacés de \(200\,\kilo\hertz\) et l’excursion en fréquence autorisée est donc au maximum de \(\Delta f = 80\,\kilo\hertz\) pour un signal utile de fréquence maximale \(f_u = 20\,\kilo\hertz\). Pour y parvenir une chaine de radio doit régler l’excursion en fréquence de son antenne via la relation \(\Delta f = K_p v_u\) (donc régler \(K_p\) ou \(v_u\) de façon à obtenir \(\Delta f < 80\,\kilo\hertz\)). Ceci garantit une bonne cohabitation des stations de radio sur l’ensemble du spectre disponible.

Démodulation de fréquence

La démodulation de fréquence peut être réalisée par une boucle à verrouillage de phase. La fréquence centrale du VCO est réglée sur celle de la porteuse \(f_p\). Une fois la boucle verrouillée, le VCO délivre un signal de fréquence \(f_2(t) = f_p + K_p u_f(t)\) égale à la fréquence du signal d’entrée modulé en fréquence en amont par un autre VCO \(f_1(t) = f_p + K_p' v_u(t)\) (on suppose que l’émetteur utilise un VCO de constante différente \(K_p'\)). On en déduit la forme du signal à la sortie du filtre passe-bas \(u_f(t)\) en cas de synchronisme:

\[f_2(t)=f_1(t) \Leftrightarrow f_p + K_p u_f(t) = f_p + K_p' v_u(t) \Leftrightarrow u_f(t) = \frac{K_p'}{K_p} v_u(t)\]

La tension en sortie du filtre est donc l’image du signal modulant: l’utilisateur peut donc utiliser la sortie du filtre pour écouter la radio FM.

Suppléments sur les télécommunications modernes

Aujourd’hui, il faut être conscient que la radio est bien plus complexe que ce qui est présenté en TP, avec notamment la transmission de signaux stéréo (donc codage du signal "gauche" et "droit"), et surtout une transmission non plus analogique mais numérique.

Antennes radio

Tableau 25 l’ancien émetteur de France Inter en ondes longues sur \(162\,\kilo\hertz\) implanté à Allouis, constitué de deux pylônes de \(350\,\meter\). Droite : antennes des émetteurs ondes courtes de \(500\,\kilo\watt\) de Radio France International (RFI) à Ste Aoustrille prés de Issoudun.
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Quelques mots sur les antennes radio. La chaîne France Inter possédait jusqu’au 31 décembre 2016 une seule antenne pour émettre en grandes ondes (modulation d’amplitude à \(162\,\kilo\hertz\)) située à Allouis dans le Cher (centre de la France). L’antenne est en réalité constituée de deux pylônes de 350 mètres (plus hauts que la Tour Eiffel) d’une puissance de \(2000\,\kilo\watt\), pour pouvoir émettre sur des milliers de kilomètres à travers l’Europe (figure Tableau 25). Avant la numérisation des appels téléphoniques, l’antenne créait de telles perturbations dans son environnement immédiat que les habitants des communes alentour pouvaient écouter France Inter sur leurs téléphones fixes.

Cet émetteur est aujourd’hui chargé uniquement de diffuser par radio en modulation de phase l’heure légale française définie par une horloge atomique située dans le bâtiment principal. Le signal émis présente l’avantage d’une meilleure réception à l’intérieur des bâtiments que d’autres, tels les signaux GPS ou les signaux de téléphonie mobile. L’établissement et la diffusion du temps légal français est sous la responsabilité du laboratoire LNE-SYRTE de l’observatoire de Paris, ainsi que son raccordement au temps universel géré par le Bureau International des Poids et Mesures (BIPM) (décret n\(\degree\)2017-292 du 06 mars 2017) [3]. Avoir accès au temps légal français intéresse particulièrement les acteurs institutionnels (judiciaires, collectivités), bancaires (pour dater finement les transactions), industriels (télécommunications ou EDF par exemple) (exactitude en temps l’ordre de la milli-seconde, stabilité en fréquence à \(10^{-12}\))..

Autres antennes d’envergure : les antennes des émetteurs ondes courtes (\(\approx 10\,\mega\hertz\)) de \(500\,\kilo\watt\) de Radio France International (RFI) à Ste Aoustrille prés de Issoudun (figure Tableau 25). Ces antennes Alliss sont directives et tournent sur elles-mêmes. Il y en a ainsi 12 depuis 1998, de près de 180 tonnes chacune, implantées sur plusieurs dizaines d’hectares. Une seule antenne mesure \(80\,\meter\) de hauteur, d’un poids de 180 tonnes, et occupe prés de 3 hectares. Ce type d’antennes est implanté directement au-dessus de son émetteur de \(500\,\kilo\watt\), installé dans le "bloc bâtiment" supportant l’antenne. Elles portent toutes le nom d’un grand fleuve vers lequel elles sont le plus souvent dirigées (Danube, Volga, Gange, Mississippi,...).

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Enfin, en modulation de fréquence la portée des antennes est beaucoup plus courte (environ \(50\,\kilo\meter\)) ce qui oblige une station à disposer de nombreuses antennes, sauf en milieu urbain où le jeu des réflexions sur les murs d’immeubles permet de mieux diffuser la radio aux utilisateurs [4]. Mais pour éviter qu’un utilisateur ne capte deux ou trois antennes en même temps et entende des signaux décalés (voire qui interférent), des antennes voisines diffusent une même station à des fréquences différentes. Voilà pourquoi on constate que les fréquences de France Inter changent régulièrement entre départements.

Multiplexage

Selon le support de propagation de l’onde électromagnétique (air ou câble électrique), il existe différents moyens pour partager les informations codées sur une porteuse électromagnétique aux différents utilisateurs. Le multiplexage est une technique qui consiste à faire passer plusieurs informations à travers un seul support de transmission. Il existe deux techniques principales de multiplexage : temporelle et fréquentielle.

Le multiplexage fréquentiel consiste à partager le spectre électromagnétique de l’émetteur en différents canaux de fréquences. Chaque canal doit contenir la majeure partie (en puissance) du spectre de la porteuse modulée pour que le signal codé ne se retrouve pas dans les bandes voisines.

Le multiplexage temporel consiste à répartir le temps d’utilisation de la bande passante entre les différentes communications. Par exemple, en téléphonie fixe plusieurs utilisateurs peuvent être branchés sur un même câble et communiquer en même temps, mais un commutateur rapide répartit temporellement les signaux sur la ligne. Les trames d’une durée de \(125\,\micro\second\) sont divisées en 32 intervalles de temps, donc un utilisateur reçoit \(3.9\,\micro\second\) de conversation toutes les \(125\,\micro\second\) [5]. Le récepteur doit être synchronisé en phase avec le commutateur pour recevoir la bonne communication. On notera que dans cet exemple, le multiplexage temporel est possible car pour transmettre la voix il suffit de transmettre son mode fondamental pour que le discours reste intelligible. Le partage de la ligne se fait donc au détriment de la qualité de restitution de la voix (d’où une déformation de la voix des interlocuteurs au téléphone).

La norme GSM en téléphonie mobile utilise à la fois le multiplexage fréquentiel (les utilisateurs sont répartis dans différents canaux en fréquence larges de \(200\,\kilo\hertz\)) et temporel (les utilisateurs d’un même canal n’utilisent qu’une fraction temporelle de l’antenne [6]).

Récepteur superhétérodyne

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Fig. 60 Chaîne de réception superhétérodyne dans le cas de la radio (source: Wikipedia)

Pour un type de transmission sur porteuse électromagnétique il existe de nombreux canaux adjacents qui doivent être décodés par le même appareil, et qu’il est pourtant nécessaire de bien séparer lors de la réception. Il serait difficile de construire des filtres très sélectifs en grand nombre dans un récepteur (un par canal), voire de faire un filtre accordable en fréquence sur une plage très large et présentant de très bonnes caractéristiques.

La technique dite superhétérodyne (abréviation de "supersonic-hétérodyne") consiste à mélanger le signal radio-fréquence de fréquence \(f_p\) à décoder avec le signal d’un oscillateur local \(f_{LO}\). On obtient alors classiquement la somme et la différence des fréquences, cette dernière étant centrée sur la fréquence dite intermédiaire \(f_I = \vert f_p-f_{LO}\vert\). On peut ensuite isoler le terme de la différence avec un filtre passe-bande centré sur la fréquence intermédiaire. Pour que le tout fonctionne, l’utilisateur modifie la fréquence \(f_{LO}\) de l’oscillateur local de façon à ce que la fréquence intermédiaire obtenue rentre dans la bande passante du filtre passe-bande. Pour réaliser le mélange de deux signaux sinusoïdaux, on peut utiliser un multiplieur pour les basses fréquences, ou un mélangeur à diodes pour les plus hautes fréquences.

Selon les fréquences, l’oscillateur local peut être issu d’un simple oscillateur à quartz ou d’un processus numérique de synthèse de signaux (Direct Digital Synthesis) directement intégré dans une puce électronique. Ces derniers sont basés sur le principe du compteur numérique et de la conversion numérique analogique, et s’ils sont codés sur un nombre de bits élevés ils permettent à l’utilisateur d’avoir une incrémentation plus fine dans le choix des fréquences (voir une illustration du principe avec le convertisseur simple rample chapitre Electronique numérique).

Le filtre intermédiaire est conçu autour des fréquences intermédiaires de \(455\,\kilo\hertz\) (pour la modulation d’amplitude), \(10.7\,\mega\hertz\) (pour la modulation de fréquence en radio), ou \(38.9\,\mega\hertz\) (pour la télévision en Europe). Les fréquences intermédiaires sont le plus souvent contrôlées par les autorités de chaque pays (pour éviter que des bruits parasites ne soient émis à ces fréquences), et c’est pourquoi elles sont prédéterminées selon les usages. La réponse du filtre doit être suffisamment large pour contenir le spectre complet du signal à recevoir, et pour accepter les dérives de fréquence de l’émetteur et de l’oscillateur local du récepteur. A contrario, la réponse du filtre doit être suffisamment étroite pour rejeter convenablement les émissions adjacentes. On trouve dans le commerce de bons filtres très sélectifs à ces fréquences là, principalement à base de céramiques ayant une résonance à la fréquence considérée (voir Figure Fig. 61). Typiquement, la bande passante de ces filtres est de \(80\,\kilo\hertz\) en FM et \(10\,\kilo\hertz\) en AM.

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Fig. 61 Filtres céramique \(455\,\kilo\hertz\) à six éléments (à gauche) et filtre céramique \(10.7\,\mega\hertz\) (à droite) (source: Wikipedia).